lundi 25 décembre 2023

Bambou, Fer et Coton, Un Nouvel Univers


一层功,一层理
Un niveau de compétence, un degré d’ordre intrinsèque1.

古者謂是采真之遊
C’est ce que les anciens appelaient cueillir les errances authentiques2.



Les anciennes pratiques étaient en constante évolution, ce qui impliquait des changements, ce qui signifiait parfois arriver à quelque chose de totalement nouveau avec des règles ou des principes très différents à suivre. C’est ainsi que les petite, moyenne et grande maîtrises qui caractérisaient l’entraînement d’une personne étaient une façon de refléter ce fait. Pour ces dernières, cela allait généralement de pair avec une transformation profonde du corps, lui procurant la possibilité de fonctionner d’une manière très distincte. L’entraînement au bambou, au fer et au coton correspond à une nouvelle sphère, après celle du droit, du rond et du verrouillé.
L’accès à un nouveau domaine implique de pouvoir répondre à deux questions : quelle transformation corporelle est nécessaire pour atteindre un tel niveau et quels seraient les nouveaux principes directeurs à suivre ? Un tel poste va un peu à l’encontre, il faut l’admettre, de la logique de la découverte par soi-même3.




I. Un Nouveau Départ

C’est par le corps, la respiration et l’alchimie interne qu’il est possible de vérifier si l’on est capable de passer à l’entraînement au bambou.

1.1 Le Corps
Il a fallu atteindre les verrous, être capable de tendre, si ce n’est la totalité, la plus grande partie du corps en trouvant les bons alignements. Les muscles doivent être tendres et la force doit pouvoir être créée à volonté en les étirant, complètement relâchés, autant que possible dans les six directions (ou en trois dimensions) afin de bander l’ensemble des fascias.

1.2 La Respiration
Il faut comprendre les techniques de base de la respiration cutanée en ce qui concerne celle externe, ainsi que celles de condensation et de compression pour l’interne. Cela signifie que le ventre doit être aussi plat que possible au moment d’atteindre les verrous.

1.3 L’Alchimie Interne
Mobiliser les organes et pouvoir, au moins, travailler avec les dantiens du bas et du milieu, voilà ce qu’il faut maîtriser. Le « voleur qui épie » pour mobiliser les organes et faire sombrer les dantiens, 沉丹田, sont les bases à maîtriser4.

Aller au-delà du droit, du rond et du verrou, c’est progresser vers de nouveaux principes et de nouvelles méthodes d’entraînement.




II. Un Nouvel Ordre

De nos jours, la plupart des formations se concentrent sur quelques principes, parfois observés religieusement. Il est très important de comprendre que les anciennes pratiques internes, en particulier celles qui se basent sur les principes taoïstes du changement éternel et de la vérité dans l’instant, suivent donc des principes changeants et évolutifs. Le fait de passer du droit, du rond et verrouillé au bambou, fer et coton en est un exemple caractéristique. De tels changements seront présentés dans ce billet.
Fondamentalement, les alignements, la respiration et l’alchimie interne respecteront d’autres règles.

2.1 L’élasticité par rapport à l’alignement
Parce que les anciennes pratiques fonctionnent par tendance, certains principes l’emportent sur d’autres. Ici, c’est la connectivité par l’élasticité qui sera recherchée. Par conséquent, les alignements ne seront plus aussi importants qu’auparavant. Cela sera évident lors de la pratique du poing qui balance, déjà mentionnée dans ce blog, où le haut du corps se pliera autant que possible vers l’avant, l’arrière, à droite ou à gauche…, paraissant totalement déséquilibré et délaissant certains des alignements précédemment suivis dans droit, rond et verrouillé, en particulier la verticalité de la colonne vertébrale.

2.2 Le vide sur le plein
La technique respiratoire de base pour les positions droites, rondes ou verrouillées consiste à apprendre comment remplir l’estomac, puis comment le comprimer. En bambou, fer et coton, la technique de base est totalement inversée, il s’agit d’apprendre à vider le ventre au maximum.

2.3 Flotter plutôt que couler
Faire sombrer les Dantiens, 沉丹田, sera également inversé, il faudra chercher 丹田浮, les Dantiens flottants5. Pour ce faire, 灌丹田, verser (dans) les dantiens, et 贯丹田, percer les dantiens, sont des techniques qui devront être entraînées. Par ailleurs, de la même manière que la respiration, la mobilisation des organes deviendra « l’invalidation des organes ».

Enfin, comme chaque étape de droit, rond et verrouillé connaît un ensemble particulier de principes, bambou, fer et coton seront également des sous-domaines. Ainsi, le bambou et le fer mettront l’accent sur un corps flottant, tandis que le coton sur un corps qui sombre, par exemple.




Ne jamais être confiné à une technique, un exercice, une routine, une théorie, un ensemble de principes et toujours évoluer était une devise presque oubliée aujourd’hui des pratiques internes. Le prochain billet sur le sujet présentera la méthode du bambou, du fer et du coton, en soulignant ce qu’il peut en rester dans la culture populaire des arts martiaux.




2 Révolution Céleste, Chapitres Extérieurs, Zhuangzi, 莊子, 外篇, 天運.
3 Comme mentionné très tôt dans ce blog dans Méthode, la découverte de soi est la pierre angulaire des pratiques internes.
4 Lors des verrous, on commencera également à travailler 灌丹田, verser (dans) les Dantiens, la technique suivante.
5 Dans les pratiques internes, couler et flotter sont des opposés complémentaires, c’est-à-dire qu’ils interagissent.

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