vendredi 7 décembre 2018

Surcharge


鐵杵成針
Poncer une barre de fer jusqu'à ce qu’elle devienne une fine aiguille.

集腋成裘
Les petits ruisseaux font les grandes rivières (en rassemblant les peaux des aisselles, on arrive à faire une fourrure).




L'utilisation des poids dans les anciennes pratiques est souvent une question mal comprise. En effet, elle est souvent considérée comme bonne ou mauvaise. Les anciennes pratiques attachaient une grande importance à la méthode, ce qui ne signifiait la plupart du temps ni l'inclusion totale ni l'exclusion d'un exercice. Tout était une question d'opportunité, donc de quand, comment et pourquoi.
La première question à laquelle il fallait répondre était de savoir pourquoi utiliser des poids pendant l'entraînement, quand cela était opportun et comment s'entraîner avec ceux-ci. Comme l'entraînement était avant tout fait pour les enfants et les adolescents, donc pour des corps qui se transformaient très rapidement, l'opportunité de les utiliser allait se présenter très rapidement. Ainsi, en ce qui concerne les adolescents, les poids faisaient presque dès le début partie de leur entraînement. Malheureusement, passer d'un enfant entraîné professionnellement à un adulte dans le cadre de loisirs change totalement la donne. Par conséquent, il peut être intéressant de décrire comment les adultes doivent envisager la question des poids.
Les deux principaux objectifs des pratiques internes sont d'améliorer la flexibilité et les organes. Les poids sont considérés comme des accélérateurs, le pourquoi. Accélérer n'est pas une bon ou mauvais en soi, tout est une question de justesse. En d'autres termes, les poids feront porter à un bon entraînement plus de fruits, mais plus d'effets négatifs s'il est mauvais. Et comme les adultes mettent beaucoup plus de temps à se rétablir, la nature de l’entraînement devient une question clé.
Pour les adultes, la possibilité de s'entraîner aux poids réside dans le fait d'avoir au préalable un corps suffisamment transformé, le quand. Cependant, un corps transformé ne suffit pas, il faut comprendre les limites de l'entraînement aux poids (une règle qui s'applique aussi aux enfants), le comment. 
Puisque la transformation nécessaire d'un corps se servant principalement de la contraction musculaire à un utilisant l'élasticité des fascias a été plus que largement décrite dans ce blog, ce qui est suffisant pour comprendre quand son corps est devenu assez souple pour s'entraîner avec des poids. Dans le cas contraire, travailler avec des poids ne fera qu'améliorer la contraction, à l'opposé de ce qui est recherché. Le présent billet se concentrera donc sur le comment. Pour s’entraîner correctement avec des poids, il est important de connaître les points de rupture afin de les éviter à tout prix. De plus, il faut faire une différence entre postures et mouvements.




I. Rupture

L'entraînement aux poids était très progressif afin d'éviter d’aller au-delà de ce que le corps pouvait raisonnablement supporter, une méthode que les dictons cités plus haut décrivent. L'idée était de commencer par du relativement facile, puis d'augmenter très progressivement. Ciblant les enfants, le temps n’était non seulement un problème, mais cela permettait aussi d'influencer leur croissance. Leur corps s'adaptait, donc, beaucoup plus facilement. Les adultes, étant très rigides en comparaison, doivent faire encore plus attention d’éviter la surcharge pour ne pas se blesser. De plus, en raison du rythme de vie moderne, la vitalité des adultes peut changer radicalement au cours d'une journée, ce qui signifie qu'il s'agit parfois, non pas d'ajouter, mais de retirer du poids parce que le corps ne peut plus supporter sa charge habituelle à un moment précis.
Fondamentalement, il y a trois points principaux auxquels il faut prêter attention : les muscles, la posture et les organes.

1.1 Retour à la Contraction
Les réflexes imprimés sur une longue période sont difficiles à perdre. Si le poids est trop lourd, même si le corps est devenu suffisamment souple, une pression supplémentaire trop forte peut le pousser à reprendre ses vieilles habitudes. Par conséquent, lors de la manipulation de poids, il faut s'assurer que le corps s'étire toujours, les muscles complètement relâchés. Dans le cas contraire, la charge est trop importante et doit être réduite. En effet,  la nature humaine pousse à vouloir s'entraîner avec des poids de plus en plus lourds, les plus lourds possible. Ceci contredit totalement la méthode des petits ruisseaux qui font de grandes rivières, l'un des principes de base de l'apprentissage des arts internes. De plus, un entraînement en surcharge  les bras tendus ne peut que sûrement mener à des tendinites.

1.2 Perdre sa Posture
L'entraînement avec des poids est également destiné à améliorer la posture en renforçant l'élasticité et la connectivité des fascias. Par conséquent, si l'on perd les bons angles à tenir du fait de poids trop lourds, cela aboutit à l'effet inverse. De plus, sous n'importe quelle pression, qu'il s'agisse de poids ou autre, on va alors en fait imprimer le réflexe de perdre sa posture.
En ce sens, la région pelvienne est de la plus haute importance. En effet, là où l'externe rencontre l'interne, tout entraînement aux poids a pour but de renforcer cet endroit et de le rendre de plus en plus ferme. Si la charge est trop importante, cela aura l'effet inverse. Pratiquement, il s’agira de l’avis d’aller aux toilettes pendant l'entraînement ou de l’augmentation de la fréquence quotidienne de leur utilisation. Étant également l'un des pièges de la respiration abdominale, la capacité de maintenir le bassin dans une posture correcte, en particulier le basculement des fesses, est une priorité. La même règle s'applique, bien sûr, à la poitrine, qui doit rester contenue. En effet, soulever la poitrine pour supporter le poids est exactement le contraire de ce que recherchent les pratiques internes, elles utilisent le dos et pas l’avant du thorax.

1.3 Défaillance Organique
La façon pour les internalistes de vérifier si quelque chose a un mauvais impact sur les organes est très simple et bien connue : les cernes. Par conséquent, si après un entraînement avec des poids, ou le lendemain, on a tendance à avoir des cernes foncés ou beaucoup plus foncés autour des yeux, pour les anciennes pratiques il s’agit d’un signe que l’on a endommagé ses organes. En effet, si la charge est trop importante ou le changement trop violent, les organes finiront par se blesser, à l’image d’un muscle qui fait face à un exercice trop fort.
Un autre signe façon est l’envie de vomir, ou même de le faire. En effet, comme les muscles finissent par avoir des crampes s'ils sont soumis à un effort trop violent, forçant le corps à s'arrêter, les organes, suivant la même logique, font vomir parce qu'ils ne supportent plus l'effort. Par conséquent, une telle envie pendant l'entraînement, est un signe que la charge est trop forte pour sa vitalité à ce moment précis, ou plus simplement l’état de santé de ses organes.

Les écueils évités, il faut comprendre la différence qu’il existe entre postures et mouvements.




II. Poids, Postures et Mouvements

La règle de base est que l'on peut cibler les zones lestées pendant les postures d'entraînement, mais, en mouvement, le poids doit être réparti uniformément sur l’ensemble corps pour éviter des blessures qui viendraient de déséquilibres ainsi crées, à l'exception des armes.

1.1 Ciblage Postural
L'utilisation de poids lorsque l’on tient des postures vise principalement à améliorer la flexibilité des lignes fascias, se concentrant souvent sur les tendons et les ligaments, leur partie la moins souple. Pour les adultes, ils peuvent être cependant aussi être utilisés pour étirer davantage n'importe quelle partie du corps. Comme cela a déjà été mentionné à maintes reprises dans ce blog, de tels exercices ne peuvent être bénéfiques que si les muscles sont totalement relâchés. Sinon, les risques de blessure sont grands.
Les exemples suivants peuvent donner une idée du type d'entraînement aux poids dans les postures utilisées dans les anciennes pratiques :
- En étirant les jambes, une jambe d’appui et l'autre levée, en mettant un poids soit sur le genou de celle qui est levée, soit sur la plante du pied quand on est assez souple pour lever sa jambe verticalement.
- Mettre des poids sur le dessus des articulations des épaules tout en gardant une posture similaire à « Wei Tuo Présente le Pilon II » afin de les presser encore plus vers le bas.

Wei Tuo Présente le Pilon II
- Mettre des poids sur ses trapèzes tout en gardant le même type de posture afin d'améliorer l'étirement et la rectitude de la nuque.
...

1.2 Mouvement et Répartition Uniforme
Ce que la posture permet, le mouvement l'interdit. En effet, lorsqu'on met des poids ciblés sur son corps, cela le déséquilibre, ce qui la plupart du temps entraîne des risques de blessures. Comme les anciennes pratiques considéraient, et surtout lorsqu'il s'agissait d'adultes, que les blessures affaiblissent le corps tant à court qu’à long terme, ils faisaient de leur mieux pour les éviter, surtout lors de l'entraînement. Par conséquent, la règle était de répartir le poids aussi uniformément que possible. Ainsi, on pouvait s'entraîner avec une combinaison spéciale, souvent en cuir, avec beaucoup de poches, une centaine d'entre elles, les remplissant très progressivement de poussière de fer ou équivalent. « La littérature pour les pauvres, les arts martiaux pour les riches »*, un vieux dicton qui rappelle que l'entraînement des pratiques anciennes nécessitait beaucoup d'équipement. Aujourd'hui, non seulement la plupart de ces équipements spécialisés ne sont plus disponibles, mais la connaissance liée à ces entraînements a pratiquement disparu.
Les adultes, dans le cadre de loisirs, ne peuvent malheureusement pas envisager de tels entraînements.  

1.3 Armes Lourdes
Un des buts ultimes de l'entraînement étant de manipuler des armes, l’obligation de répartition uniforme des poids connaissait une exception évidente, les mains. En effet, suivant les principes d’un entraînement lourd et en longueur pour ensuite se battre court et léger**, il n’y n'avait pas d'autres choix que de devoir faire face au déséquilibre qu'entraînait la manipulation d'une arme. Il donc habituel dans beaucoup d’anciennes pratiques de s'entraîner avec des armes lourdes et surdimensionnées***. L'entraînement progressif étant encore la règle et on commençait avec une arme légère pour, peu à peu, s’entraîner avec de plus en plus longues et plus lourdes. Les restes d'une telle méthode peuvent encore être trouvés dans les styles ayant gardé une arme lourde dans leur formation de base, les plus célèbres de nos jours étant la perche, la longue lance et le très grand et large sabre.
Au niveau de la poigne, le but des armes lourdes était d'entraîner les doigts et le poignet. En ce qui concerne le mouvement de tout le corps, il était destiné à le mettre dans une posture la plus déséquilibrée avec une manipulation la plus inconfortable possible. Capable de manipuler des armes aussi peu pratiques, il était alors facile de se servir d’une arme beaucoup plus légère et plus courte, la gêne occasionnée par la manipulation disparaissant totalement.




Aujourd'hui, dans l'apprentissage des arts internes en mode  loisir, le travail sur la flexibilité devrait être plus une priorité que la manipulation de poids ou d'armes que l'on n’est jamais amené à utiliser. En tout état de cause, toute formation doit s'efforcer de suivre les principes dictés par les deux idiomes cités, régularité et extrême progressivité. Il faut toujours garder à l'esprit que c'est le corps dans son ensemble, quel que soit l'exercice, qui est visé dans les pratiques internes. Ainsi, un progrès invisible sur l'ensemble du corps demeure définitivement plus bénéfique qu'un progrès visible sur n'importe quelle partie de celui-ci. Les arts internes, après tout, traitent de ce que les yeux ne peuvent pas voir.




*窮文富武。
**練長使短,練重使輕。

***Les chaînes sont une exception. En effet, dans ce cas, s’entraîner à sa réactivité était plus important et, plus la chaîne était légère, plus elle était difficile à manipuler.

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