急著,目光閃急,如線穿空,劍貫重甲,清利而直銳也*.
Celui qui est rapide (les yeux), un regard rapide et brillant, comme une ligne transperçant le ciel, une épée transperçant une armure lourde, tranchante, minutieuse et incisive.
眼要毒,心要狠
Les yeux doivent être féroces, le cœur impitoyable.
Au moins trois caractères peuvent être développés : 之, 奪 et 懼. En effet, puisque 之 signifiait à l'origine "sortir", on peut se demander quelle règle s'applique alors à ce qui, à l’inverse, entre. 奪 et 懼 sont intéressants parce que tout en n'étant pas la façon la plus courante d'exprimer leur sens respectif, ils contiennent tous les deux le radical 隹. Il semble donc qu'ils aient été choisis à cette fin.
I. Extérieur et Intérieur
Si 之 est considéré dans son sens originel, sortir, alors 見之似好婦,奪之似懼虎 signifierait plus ou moins « Avoir l'air d'une gentille dame quand on sort, se battre comme un tigre menaçant ». Une telle phrase traite directement de ce qui se passe quand on est à l'extérieur, en train de se battre ou simplement d'interagir dans la société. En appliquant la méthode de base de la théorie du Féminin et du Masculin (Yin et Yang), la phrase peut devenir « Avoir l’air d’un tigre menaçant quand on rentre, se battre comme une gentille dame », 見似懼虎,奪入似好婦. L'une des explications possibles est l'opposition entre combat et entraînement.
Dans ce sens, le combat est considéré à l'extérieur, sortir, et l'entraînement à l'intérieur, entrer. Par conséquent, quand on s'entraîne, on doit ressembler à un tigre tout en utilisant des qualités féminines pour la lutte qu’il faut livrer contre soi-même.
Ressembler à un tigre menaçant a pour but d'atteindre au moins deux objectifs, de ne pas être dérangé par ce qui se trouve à l'extérieur parce cela agit comme une barrière et de mobiliser pleinement ses organes parce que cela ne peut se faire que de cette façon. La dame aide à supporter (l'indulgence d'une mère, une jolie dame qui ne s'impressionne pas facilement...) ainsi qu'à garder le contrôle du tigre.
Il est possible, aussi, de chercher une explication encore plus interne limitée aux organes.
II. Petite Étreinte
奪 et 懼 contiennent tous les deux le radical 隹 et leur utilisation est particulière. 奪 signifie habituellement s'emparer de, arracher, se ruer, gagner, remporter, enlever, prendre de force. Le sens plus général de combattre, les caractères 搏, 打 ou 鬥 paraissent plus habituels. L'utilisation de 奪 est alors à considérer comme une énigme à résoudre dans laquelle le radical 隹 joue un rôle central. Le sens originel de 隹 oiseau, et plus particulièrement un oiseau avec une petite queue. De plus, ce qui rend le caractère aussi intéressant est qu'il est fait de huit traits, huit le nombre qui symbolise les changements.
奪, Tenir un Oiseau dans une Étreinte
Cette signification originale du caractère se réfère directement à un principe que l'on retrouve dans de nombreuses pratiques appelées 懷抱, étreindre, enlacer. En effet, une fois que la rectitude entraînée, toutes les lignes de fascias renforcées et reconnectées, il faut orienter son entraînement vers la rondeur, ce qu’ « embrasser » symbolise. Il est ainsi possible de trouver encore aujourd'hui beaucoup de postures demandant à l'étudiant d'embrasser quelque chose comme une balle dans les bras et/ou les jambes par exemple. L'entraînement aux verrous, où il s’agit de trouver la partie de son corps à arrondir pour verrouiller automatiquement une section entière** du corps, utilise également ce geste d'étreinte comme résultat à atteindre.
奪, De Grand à Petit
Puisque 隹 fait de huit traits symbolise les changements, on peut lire le caractère comme grand, 大, se transformant en très court, 寸. En ce sens, 奪 symbolise l'opposition directe entre le combat et l'entraînement, où l'on s’entraîne long mais utilise court. Une application directe de ce principe peut être trouvée dans les écoles où les élèves pratiquent d'abord leurs routines en étendant les bras aussi droits que possible alors qu'en combattant leurs bras (par opposition à l'avant-bras) doivent toujours rester collés aux côtes. L'application directe de ce principe est donc le dicton "手高,高不過鼻,手底,底不過膝 ", qui dit que les mains ne doivent jamais dépasser le nez ou descendre plus bas que les genoux***.
隹 se trouve également dans 懼, ce qui renforce l'idée qu'une telle utilisation n'est pas une coïncidence.
III. La Peur, le Cœur Visible dans les Yeux
懼 signifie craindre, redouter, avoir peur et menacer par extension. L’utilisation des caractères 嚇 ou 脅 semblant plus courante, le fait que 懼 ait été utilisé précisément parce qu'il contient 隹 ne peut être évitée.
懼, Oiseau Appeuré
懼 est composé de 忄, coeur, 䀠, en regardant à gauche et à droite, et 隹 petit oiseau. On peut facilement voir un petit oiseau effrayé regarder dans toutes les directions pour s'échapper, surtout s'il est tenu dans une étreinte, ce que 奪 exprime. Il faut aussi considérer que, de plus, 瞿 signifie surpris.
On peut donc conclure qu'un tigre doit engendrer une telle peur chez son adversaire.
Cependant, il existe une autre façon de déchiffrer ce caractère qui peut être encore plus proche de sa signification voulue. En effet, 瞿 signifie aussi "le regard d'un aigle". L'idée serait alors d’avoir un regard féroce et plein de vie, 瞿, pour effrayer au plus profond le cœur, 忄, de son adversaire. Cette compréhension est facilitée par le diction 鷹視虎步****, le regard de l'aigle et le pas du tigre, qui signifie avoir une apparence effrayante et pleine de vigueur.
Un tel regard intrépide provient d’entraînements au mental.
懼, Coeur et Yeux
Avec les huit traits de 隹 symbolisant le changement, 懼 insiste sur le fait que la peur, inspirée ou à inspirer, est dans le cœur et brille dans les yeux. Certaines anciennes pratiques entraînaient à atteindre un vide où le cœur devient sans cœur, les yeux se changeant en un regard meurtrier pour effrayer ses adversaires. Il est intéressant de noter que par ses deux sens opposés, effrayé et effrayant, 懼 exprime une relation profonde où l'on doit devenir sans cœur, donc effrayant, une folie meurtrière qui brillera dans les yeux, directement dirigée vers les yeux de ses adversaires, ce qui les effrayera au plus profond de leur cœur.
Par conséquent, les anciens conseillaient d’éviter de regarder son adversaire sauf pour utiliser ses yeux pour terroriser ses adversaires d'un seul regard rapide et décisif.
On peut, enfin, retrouver en la présence de 隹 l'opposition oiseau/félin, un classique des arts martiaux.
IV. Prédateur et Proie
On ne peut pas non plus négliger la présence d'un oiseau et d'un félin, deux symboles souvent utilisés dans l’entraînement, dans la deuxième partie de la déclaration. En effet, l'oiseau et le félin représentent des façons différentes de combattre en raison de buts différents, comme l'auraient eu les voleurs et les gardiens. Dans ce cas particulier, l'accent est mis sur les prédateurs et les proies.
En effet, en utilisant 奪 le texte insiste sur la lutte, c'est-à-dire qu'il faut aussi prendre en considération la résistance de la proie (l'oiseau essayant d'échapper à l'étreinte), et en 懼 le fait que la proie ne reste pas immobile (les yeux se déplaçant à gauche et à droite). Pour ne pas rendre ce poste trop long, la vigilance pour le prédateur et la mobilité pour la proie sont deux choses à rechercher.
Vigilance pour le Prédateur
Aussi évident que cela puisse paraître, il faut se souvenir qu'une proie reste dangereuse, surtout si elle est aussi agile et rapide qu'un petit oiseau (essayez d'en tenir un contre votre poitrine). Ainsi, le caractère véhicule l’idée qu’un combat reste dangereux, même pour un prédateur, qu’il faut rester vigilant, d'où la référence au cœur et aux yeux, les deux facteurs les plus importants en matière de vigilance.
Mobilité pour la Proie
Cela peut paraître également évident, mais 奪 et 懼 expriment le fait que si l'on finit par être une proie, cela conduit à avoir, la plupart du temps, à s'échapper le plus vite possible, certainement pas rester sur place, un principe souvent utilisé par les écoles modernes d'autodéfense. En d'autres termes, un prédateur cherche des mouvements rapides, minutieux et décisifs pour capturer tandis qu'une proie va chercher à blesser tout en essayant de s'échapper, deux façons très différentes de se battre en fait.
Cette longue explication d'un seul extrait de La Dame de Yue est un exemple de la façon dont les artistes martiaux pouvaient se servir de textes pour trouver, dans une très courte déclaration, autant de principes que possible, une sorte de mémento. Il est important de se rappeler, dans une pratique régie par les changements, que les exercices codifiés ou les formes suivaient le même schéma. En effet, ils servaient aussi de mémentos à disséquer et à amplifier, donc à modifier, en fonction des besoins réels de chaque élève, certainement pas à reproduire de la même manière à chaque fois et par tout le monde. Cette dernière façon de faire n'est que l'évolution moderne des anciennes pratiques en produits de loisirs pour les masses.
*Entraîner les yeux, L’Épée du Chaos, Bikun, 練眼,渾元劍經,畢坤.
**Les verrous sont un entraînement corporel transformé avancé qui suppose d'avoir d'abord atteint l'extension maximale des fascias par la rectitude. Il est nommé de cette façon parce qu'il conduit à ce que certaines parties de son corps se verrouillent grâce à un étirement tout en rondeur. En ce sens, dans ce qu'on appelle l'entrejambe rond, les genoux sont visiblement séparés et peuvent être difficilement bougés alors que les deux pieds restent collés l'un contre l'autre.
***Ce dicton connaît beaucoup de variantes où le nez est remplacé par la bouche ou les yeux et les genoux par les hanches et ainsi de suite... La version citée rime davantage. Il est toujours important, à l'époque du mythe de la main vide, de toujours se rappeler que les anciennes pratiques étaient faites pour combattre avec des armes. Si l'on peut toujours trouver des techniques à mains vides, il faut d'abord essayer de comprendre n'importe quel principe par le biais du maniement d’une arme.
****Un dicton similaire, "鷹視狼步", le regard de l'aigle et le pas du loup, se retrouve dans les mêmes documents historiques, Annales des Printemps et d'Automnes .
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