筋道不舒長,欲伸而筋不能伸*
Quand les canaux de fascias sont restreints et courts, on ne peut s’étirer à volonté.
發如美人之採花,收如文士之藏筆**
Se déployer telle une belle femme ramassant des fleurs, se rassembler tel un lettré ramassant son pinceau.
Par essence, les fascias sont des tissus passifs, le problème majeur étant, évidemment, comment les faire participer du mieux possible au mouvement et à la génération de puissance. Les étirements et les angles particuliers du corps sont le principal moyen utilisé par certaines pratiques anciennes afin que leurs étudiants comprennent comment générer la puissance en utilisant l’élasticité des fascias, comme cela a été décrit dans la section « Elasticité et Fascias ». Ensuite pour aller plus loin dans la compréhension de comment ceci fonctionne, il peut être intéressant d’utiliser une vieille méthode martiale, l’étude des animaux.
Structures passives transmettant des tensions mécaniques, on ne peut pas utiliser les fascias directement, mais seulement par le biais des muscles, des angles du corps et parfois de la gravité ou d’une autre force extérieure. Si dans les billets L'Arc, Pierre Angulaire de l'Elasticité et La Croix et les Six Directions, les principes de la problématique des angles ont été décrits en détail, la question du muscle peut être étudiée plus avant. Le premier problème réside dans le genre de muscle que l’on cherche pour améliorer l’utilisation de l’élasticité des fascias, principalement la différence entre des muscles tendres et des muscles durs. Plus encore, en opposant les exemples d’un gibbon en suspension et d’un travail à la barre fixe, on peut explorer les différences de mouvement entre l’utilisation de la contraction musculaire et de l’élasticité des fascias.
Un peu de Tendresse
Le premier et principal élément qui influence le mouvement de quelqu’un est sa structure, par exemple les vertébrés et les invertébrés ont, évidemment, des façons de se mouvoir très différentes. Mais le corps de quelqu’un peut aussi être, au sein de ses limites naturelles, modifié selon l’objectif principal de son mouvement habituel. Ainsi les coureurs de marathon professionnels, les nageurs, les haltérophiles, les gymnastes, les joueurs de foot ou de rugby… ont effectivement une structure de corps très particulière, une part de celle-ci étant innée (difficile d’être un joueur de basket-ball professionnel quand on mesure un mètre quarante), l’autre étant le résultat de mouvements imposés par le sport pratiqué à haut niveau. En suivant la même logique, l’utilisation de l’élasticité du fascia ou de la contraction musculaire comme principal moyen de générer la force aura naturellement un impact sur la structure du corps, et spécialement les muscles, la tendreté ou la dureté étant visée.
Pour comprendre quel genre de muscles est nécessaire pour améliorer l’utilisation de l’élasticité des fascias, les animaux peuvent être une aide. Il suffit de toucher un animal de compagnie, un chat ou un chien, pour comprendre que les muscles des animaux sont la plupart du temps tendres ou fermes, mais jamais durs. Une observation plus poussée peut mener à découvrir que ces muscles sont aussi plus allongés que compacts. Ce genre de structure musculaire est exactement ce que recherchent les pratiquants d’internes. Par conséquent, dans les arts qui ont pour but de transformer profondément le corps, la première recommandation souvent faite est qu’il faut changer ses muscles de ronds, compacts et durs vers longs, flexibles et tendres. Pour ce faire, les étirements décrits dans L'Arc, Pierre Angulaire de l'Elasticité et les billets ultérieurs devraient être pratiqués.
Un autre changement notable est qu’étirer certaines parties du corps peut aussi avoir un impact sur le volume musculaire. On peut utiliser l’exemple de la pratique de "Wei Tuo Présentant le Pilon II" et son impact sur les épaules et les muscles de la poitrine.
Contracter les muscles engendre habituellement un développement excessif des deltoïdes. Étirer de façon poussée l’ensemble des bras, épaules et muscles de la poitrine aura, au contraire, le résultat suivant :
Wei Tuo Présentant le Pilon II
Contracter les muscles engendre habituellement un développement excessif des deltoïdes. Étirer de façon poussée l’ensemble des bras, épaules et muscles de la poitrine aura, au contraire, le résultat suivant :
– Tous les deltoïdes deviendront si longs que les épaules seront basses, comme si elles disparaissaient quand on regarde le corps de profil ;
– Les pectoraux étant capables de s’étirer plus en longueur, ils paraîtront comme en excès de croissance (dans la forme d'un petit bourrelet juste sous l'épaule). ;
– Le grand rond et le grand dorsal étant plus actifs à travers l’étirement se développeront au point de remplir les aisselles, « l’aisselle pleine » comme le dénommaient les anciennes pratiques.
Puisque le mouvement recherché est fait avec des muscles tendres et flexibles, il est juste impossible de le faire avec des muscles très durs, la structure musculaire doit être d’abord modifiée avant d’apprendre à les utiliser différemment.
Relaxation Maximum, Étirement Maximum, Fermeté Maximum
Un paradoxe apparent, plus les muscles seront lâches, plus on sera ferme, est la façon dont la force est générée quand on utilise l’élasticité des fascias.
Puisque les fascias sont considérés comme des structures passives transmettant des tensions mécaniques, il faut utiliser l’étirement de muscles tendres pour utiliser pleinement leur élasticité. Par ailleurs, l’exemple du gibbon en suspension opposé au travail à la barre fixe est un bon moyen de commencer à le comprendre. En effet, le gibbon est suspendu, les bras droits, tandis qu’à la barre fixe, les bras sont fléchis. Sur la photo le gibbon est totalement détendu et la gravité fait son travail. Comme les bras sont relâchés, les muscles et les fascias s’étirent simplement jusqu’à leur limite et se tendent en créant une résistance élastique, nous voilà revenus à la corde de l'arc. La force créée est purement passive, une réaction à la pression créée par la gravité. Au contraire, en contractant et fléchissant les muscles quand on utilise la barre fixe, de façon parfois aussi évidente que sur la photo, on ne relaxe pas ses muscles et on ne laisse pas faire la gravité, les muscles et l’élasticité des fascias faisant le reste, mais à la place on les contracte pour résister activement à la force de la gravité. C’est pourquoi la barre de traction est un autre nom pour la barre fixe, l’idée étant d’aller au-dessus par la contraction musculaire, tandis que le gibbon se suspend simplement dans une totale relaxation, souvent en ayant ses doigts non pas autour de la branche et verrouillés, mais aussi en suspension. La différence en mouvement sera exactement la même. Par conséquent, l’un va d’une barre à l’autre avec les bras fléchis parce qu’il utilise la contraction musculaire, tandis que le gibbon va d’une branche à une autre avec ses bras maintenus aussi droits que possible.
Puisque la suspension est une tension élastique passive utilisant principalement la gravité, on peut se demander comment créer une tension active. En théorie ce n’est pas si compliqué, il faut juste demander à ses muscles de faire exactement l’inverse de la contraction, d’où l’incompatibilité entre les deux mouvements. En effet, au lieu de se contracter, il faudra donner l’ordre de rester aussi détendu que possible et au lieu de rétracter la masse musculaire, de l’étirer autant que possible. Cependant, pour les adultes au réflexe de contraction profondément intégré, changer de tels réflexes peut être un processus long et difficile, mais finalement très profitable. Alors, plus les muscles seront relâchés, plus ils seront capables de s’étirer, plus ils sont capables de s’étirer, plus ils pourront se tendre et par répercussion les tendons et enfin tous les autres fascias. Donc, en commençant par des postures étirant le corps et où les bras sont droits, comme dans "Wei Tuo Présentant le Pilon II", avec les angles corrects, et l’un des moyens les plus aisés de comprendre et de travailler sur la commande active « relaxer et étirer » à donner aux muscles. Dans une telle posture, il faudra essayer d’écarteler la poitrine en poussant les bras et les épaules à s’éloigner encore plus du reste du corps, c’est-à-dire en demandant aux muscles de s’étirer encore plus. Une technique plus avancée appelée 撐, supporter ou étayer dans ce cas, consiste à faire faire aux bras, toujours par le biais des épaules, des mouvements de haut en bas tout en cherchant à les étendre plus, encore et encore, dans le même temps.
Par conséquent, dès que l’on parle des muscles, pour ceux qui veulent découvrir comment utiliser l’élasticité des fascias pour générer la puissance, il est toujours important de comprendre qu’il faut traiter deux problèmes en premier, la structure musculaire, qui doit être tendre quand on est inactif, et la commande musculaire, qui devrait être de se relâcher et de s’étendre.
Évidemment, la façon particulière dont la plupart des animaux bougent a ses avantages et ses inconvénients. En effet, l’utilisation de l’élasticité des fascias n’est pas, comme toute chose en ce monde, la perfection ou la solution qui fonctionne à tous les coups. Mais parce que la contraction musculaire et l’élasticité des fascias travaillent de façon opposée, c’est une question de choix personnel en fonction de son âge, de sa pratique… Cependant, l’élasticité était auparavant le mouvement de prédilection utilisé dans les pratiques internes. Dans le cas des exercices, il est vrai que la plupart du temps c’est plus la façon de le faire que l’exercice en lui-même qui fait la différence entre l’élasticité et la contraction, mais il peut aussi être utile de reconnaître certains exercices spécialement adaptés pour améliorer l’une ou l’autre. Par conséquent, il pourrait être contre-productif de travailler sur la contraction musculaire quand on tient la posture du pont, ou l’élasticité des fascias quand on fait ce type d’exercices de flexion de biceps.
*Canons du changement des fascias, secret des vapeurs liées, discours sur l’entraînement à la forme 易筋經,貫氣訣,練形論. Cette citation nécessite plus d’explications, notamment 筋道不舒長. 道 signifie la voie, le chemin, mais aussi les canaux. 舒長 est intéressant dans le sens où 舒 signifie se répandre, s’étirer et 長 long.. Cette partie de la citation établit clairement le besoin pour les fascias de ne pas être contraints, ce qui engendre des muscles durs pour, aussi long que possible, d’où le proverbe "筋長一寸,壽長十年" Des fascias un pouce plus long, une vie rallongée de dix ans.
**Canons de boxe, préface de M. Zhang Kunzhao 張孔昭先生拳經序. Il faut aussi se rendre compte que l’utilisation de l’élasticité des fascias comme principal moyen de générer de la force va avec l’aspect extérieur d’un mouvement sans effort et l’absence intérieure d’une sensation de force, comme le dit que dicton : « sans force est la meilleure force ».
Traduction de Séraphine sur Kwoon.org
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